Pleins de petites aiguilles qui piquent frénétiquement ta peau, sans surprise, c’est douloureux. Mais la douleur fait partie du processus d’un tattoo, et comme on dit, « no pain, no gain » ! Il est peu probable de se faire tatouer sans aucune douleur, mais on a quelques tips pour éviter de passer le pire moment de ta vie.
Douleur et partie du corps
Avant toute chose, petit point sur ce qu’on nous demande le plus : « où est-ce que ça fait le moins mal ? » … Et y a pas de réponse à cette question ! La douleur est extrêmement subjective, elle varie d’un individu à l’autre, au cours d’une vie ou d’une journée, d’un centimètre carré de peau à l’autre selon les terminaisons nerveuses… Il y a quelques constantes qui reviennent dans les témoignages de pas mal de tatoué.e.s mais ce ne sont jamais des vérités générales. On pourra globalement dire que les bras et les jambes sont les zones qu’on conseille pour commencer les tatouages, car elles sont les plus simples à gérer et en grande partie peu douloureuses par rapport à un tatouage sur le dos, le torse ou les côtes. Les zones où on aura plus mal sont généralement celles où on est plus sensibles, aux caresses par exemple. Au niveau des articulations, comme le pli du coude ou les aisselles, les chevilles, les poignets, la peau est plus fine que sur le reste du corps : on peut donc ressentir la douleur un peu plus intensément. En règle générale, la sensation du tatouage est plus désagréable là où il y a peu de chair, de muscle ou de gras pour amortir la vibration de la machine. Sur les parties osseuses, on peut avoir plus de mal à gérer la vibration qui se disperse sur l’os que la sensation de piqure sur la peau elle-même. Notre corps est bien fait, et sa priorité est de réagir à tout ce qui le met potentiellement en danger, donc on aura plus de douleur à proximité des organes vitaux, moins sur les membres dont notre survie ne dépend pas vraiment.
Dans tous les cas, on te conseillera toujours de choisir l’emplacement de ton futur tatouage en fonction de comment tu veux orner ton corps, comment tu souhaites le porter pour le reste de ta vie, et non en fonction de la douleur que tu n’éprouveras que pour un temps très court (à l’échelle d’une vie, c’est quoi 3h à galérer un petit peu ?). La majorité des artistes te conseilleront également sur un placement qui sera harmonieux et esthétique sur ton corps, donc pas en fonction de la douleur potentielle.
La plupart des gens se font une idée très amplifiée de ce qu’est en réalité la douleur d’un tatouage. Certes, de grandes pièces peuvent donner lieu à des sessions très éprouvantes, mais la plupart du temps, les gens s’en sortent les doigts dans le nez. On compare souvent la sensation à une griffure de chat, à la différence qu’elle est plus continue, elle dure un peu plus longtemps. D’autres trouvent le niveau de douleur équivalent à une épilation à la cire.
Les sensations peuvent également varier selon les tatoueurs qui travaillent différemment les uns des autres, mais aussi selon les techniques employées : les lignes sont généralement ressenties comme une coupure type lame de rasoir, alors que les remplissage et les ombrages donnent plus l’impression d’un grattage profond.
La préparation
Même si le gros de la gestion de la douleur se fera une fois le démographe allumé, on peut quand même se préparer correctement pour notre session de tattoo afin d’être dans les meilleurs conditions pour faire face à la douleur. Cela passe par une bonne condition physique et mentale, comme on l’a détaillé dans notre article à ce sujet. En gros, il faut avoir des forces, de l’énergie pour que ton corps puisse encaisser le stress causé par le tatouage. Alors on mange bien, on dort bien. Ceux qui ont expérimenté un tattoo après une soirée de folie, à jeun, en sont vite revenu. C’est souvent dans ces cas là qu’on fait des petits malaises (tête qui tourne, bourdonnement dans les oreilles, vision troublée, bouffée de chaleur… qui ne va pas jusqu’à la perte de connaissance si on s’arrête). Donc on essaye d’avoir la meilleure hygiène de vie possible la veille, voire les jours qui précèdent notre tattoo.
On peut aussi se mettre en condition mentalement : ici l’idée c’est d’arriver serein.e à son rendez-vous, pourquoi pas avec de l’excitation, mais sans stress ! Si tu passes ton temps à redouter, à avoir peur, à appréhender ta séance, tu t’épuises et tu arriveras moins bien armé.e sous les aiguilles. Essaye de te convaincre que t’es un.e warrior, tu vas gérer ça comme un.e pro et tu vas avoir un magnifique tattoo que tu vas pouvoir admirer toute ta vie ! Perso, c’est penser au résultat et à quel point je le veux qui me permet d’aller à l’échafaud en sifflotant haha !
Je conseille également de relativiser, de rationnaliser le fait que ce n’est après tout qu’une piqure superficielle. L’encre va entre la première et la deuxième couche du derme, donc c’est bien moins invasif qu’une prise de sang ou même une éraflure quand tu tombes à vélo. « C’est que de la peau » : c’est ce que j’aime me dire.
L’installation
Ça y est, le tatoueur t’as posé le stencil, tout est prêt et c’est le moment de commencer à piquer. Commence par ajuster ta position, installe toi le plus confortablement possible, même si, selon les zones à tatouer, on doit parfois te mettre dans des positions improbables. Si tu sens que t’as besoin d’un petit coussin sous ta tête, de baisser un peu la hauteur de ton tabouret, ou de décroiser tes jambes, demande au tatoueur, il te dira si c’est possible ou pas car la priorité reste tout de même qu’il puisse bosser correctement. Chez Exodus, on a même des petits plaids tout doux pour pas avoir froid pendant ta session, hésite pas à en demander un si t’en ressens le besoin ! Pour à peu prés tout, il faudra trouver un compromis entre ton confort et le confort de travail de l’artiste. Par exemple, si le tattoo prend pas mal de temps, il te sera proposé une petite pause pour te laisser le temps de souffler et pour que le tatoueur se dégourdisse les poignets. Tu peux aussi en demander, surtout si tu commences à ne pas te sentir bien. Sache en revanche que plus on prend de pause et plus elles sont longues, plus le reste de la session sera compliqué : la peau commence peu à peu sa réaction inflammatoire, la zone gonfle légèrement, ce qui la rend plus sensible. Une bonne pause, ça fait du bien, mais ça peut être à double tranchant !
La respiration
Les premières minutes sont parfois les plus compliquées, parce qu’il faut le temps à ton corps de s’habituer à cette sensation, qui est peut-être totalement nouvelle si c’est ton premier tattoo. Il faut aussi ces quelques minutes pour activer ta production d’endorphine, tes hormones anti-douleur qui rendront le reste de la session plus facile à endurer. Ce qu’il faut mettre en place dès le début, et réajuster tout au long de la séance, c’est une respiration apaisée. Sous la douleur, on va avoir tendance à respirer par saccade, à retenir son souffle pendant une ligne, puis expirer brutalement. C’est pas idéal car ça va te faire te crisper, et rendre la douleur plus intense, comme on le verra dans un point suivant. Si tu as déjà pratiqué la méditation ou la relaxation, c’est le moment d’appliquer les mêmes méthodes de respiration, comme la respiration abdominale par exemple. On gonfle le ventre sur l’inspiration, on le laisse descendre et se creuser sur l’expiration.
Sinon tu peux simplement tenter de ralentir ta respiration au maximum, en inspirant tranquillement un maximum d’air, puis en soufflant lentement comme si tu soufflais dans une paille, le plus longtemps possible en vidant bien tes poumons. Si ça t’aides, compte les temps dans ta tête selon le rythme qui te convient : inspire sur 1…2…3, expire sur 1… 2… 3… 4…
Essaye plusieurs formules, selon ce qui est le plus confortable pour toi, l’idée c’est pas non plus d’être essoufflé.e, à court d’air ou en de sur-oxygéner ton cerveau jusqu’à avoir la tête qui tourne !
Tu verras que de te concentrer sur la respiration t’aidera à te détourner de la douleur. À ce titre tu peux aussi te focaliser sur la sensation de l’air qui effleure tes narines, qui passe dans ta gorge et emplie tes poumons, imaginer les petites bulles d’oxygène qui vont dans tout ton corps. Ça te mettra dans un état de relaxation qui t’aidera grandement, comme on va le voir avec la partie mentale.
Le mental
Se faire tatouer, c’est rester plusieurs heures sans bouger, et y a pas mal de chance que tu t’ennuies un peu et que ton esprit, n’ayant rien d’autre à faire, se centre sur la douleur ! Pour certaines personnes, c’est en faite en se focalisant sur la sensation qu’elles arrivent à accepter la douleur et à bien vivre le moment. Mais dans la plupart des cas, ça vous aidera de détourner votre attention, d’essayer d’oublier ce qu’il se passe sur la zone qu’on tatoue. Pour cela, hésite pas à apporter ton meilleur bouquin, ta musique avec tes écouteurs, un podcast ou un livre audio, une vidéo… c’est toi qui voit ! Perso j’ai fait des sudoku sur mon téléphone pendant que je me faisais tatouer la cuisse, et j’ai pas vu le temps passer. Après c’est possible que tu aies du mal à te concentrer sur ton activité, alors un truc chill qui demande pas trop de réflexion, c’est mieux.
Ce qui peut rendre la session plus agréable pour tout le monde, c’est aussi de papoter avec ton tatoueur ! Si tu as des news croustillantes, ou que tu souhaites juste poser toutes tes questions sur le métier de tatoueur, c’est le moment. La plus part des artistes apprécient le coté relationnel de leur métier, et seront très heureux de taper la discute. Cependant selon les gens et les étapes de leur travail, ils peuvent avoir besoin de concentration. Le tatoueur te le diras clairement et gentiment s’il n’est pas mentalement disponible pour converser, mais te vexe pas si la personne te semble un peu froide, c’est pas plus mal que sa priorité soit de te faire un tatouage aussi parfait que possible, plutôt que de se taper une grosse marrade avec toi !
D’autres préfèreront entrer dans un état plus méditatif : on ferme les yeux, on entre en nous-mêmes et on se concentre sur notre respiration, sur notre corps (et pas que là où ça fait mal). On peut utiliser des méthodes d’auto-hypnose, faire un tour mentale de son corps, faire voyager notre esprit dans chacun de nos membres, ou s’imaginer dans un décor de vacances idéales, un lieu reposant, et imaginer les sensations, les bruits et les odeurs d’une scène agréable. J’aime bien l’image d’aller « dans la zone » pour dire que je me coupe du monde et que je me centre sur ma zone intérieure.
On peut ainsi opter pour la solution qui consiste à accepter la douleur plutôt que d’essayer de l’ignorer. On se convainc que ce n’est rien, on a choisit et on assume ce qui se passe. Il faut rappeler à notre inconscient que malgré les sensations, on est pas en danger, on a pas de raison de fuir (voir notre point suivant sur la contraction des muscles). Cela peut être encore plus efficace pour gérer la douleur même si elle est intense !
Si cela te stresse ou te fait peur, essaye de ne pas regarder les aiguilles, les équipements du tatoueur et tout. Il y a forcément un peu de sang, alors si c’est quelque chose qui peut provoquer des angoisses, regarde ailleurs ou ferme les yeux pendant que le tatoueur travaille.
Les muscles
Ici il va s’agir de comprendre et de calmer tes réflexes naturels ! C’est pas facile mais c’est possible. Face à une douleur aigüe comme celle de la piqure du démographe, ton corps va se mettre en mode survie. Pour ton organisme, c’est un signal de potentiel danger, donc il se prépare à la fuite ou à la défense. Tes muscles se contractent, comme pour être prêts à bondir et courir, ton rythme cardiaque s’accélère avec ta respiration, ce qui peut provoquer des sueurs et des bouffées de chaleur. Avec un peu de temps, il est possible aussi d’avoir des tremblements ou des petites secousses comme des frissons, et il est possible d’avoir froid parce qu’on reste longtemps sans bouger. C’est parfaitement normal mais ça aide pas à avoir moins mal ! Ce qui va te soulager c’est de détendre tes muscles, de consciemment lutter contre les contractions en ordonnant à chacun de tes muscles de se relaxer. Plus tu seras détendu.e, dans tout ton corps, plus la douleur sera tolérable. Comme on le conseillait pour gérer mentalement, tu peux faire mentalement le tour de tous tes muscles, en checkant à chaque fois que la zone est bien détendue. La respiration aidera beaucoup à détendre tes muscles aussi, c’est l’alliance de toutes ces techniques qui sera le plus efficace.
Petit tip : hésite pas à prendre une chupa-chups ou un chewing-gum pendant ta session. Avoir quelque chose en bouche peut t’aider, car ça t’évitera de crisper les mâchoires et de serrer les dents. Le fait de mastiquer avec un rythme régulier peut aussi t’aider à réguler ta respiration sans même t’en apercevoir ! Avoir un goût agréable en bouche peut aussi être un bon divertissement pour ton esprit et te réconforter.
On te conseille en priorité de relaxer les muscles de ton visages, car c’est là que se concentre les crispations quand on ne peut pas bouger le reste du corps. Commence par essayer de détendre les muscles de tes zygomatiques, ton front, ton cou, tu verras que le reste suivra.
Boire de l’eau avant et pendant ta session de tatouage sera aussi hyper bénéfique pour que tu te sentes bien et que tu évites les contractures musculaires et les crampes, très souvent provoquer par la déshydratation.
Les anti-douleurs et anesthésiants
Tu auras peut-être entendu parler de solutions magiques qui permettent de se faire tatouer sans avoir mal ! C’est une fausse bonne idée la plupart du temps, c’est pour ça qu’on ne les mentionne qu’en fin d’article.
Il existe des crèmes anesthésiantes à base de lidocaïne, qui permettent d’endormir une zone de peau. C’est en général une crème à mettre en couche épaisse 1h avant le début de la session. Il existe aussi des spray qui s’applique au cours de la session car ils n’agissent que quand la peau est déjà ouverte. Dans les deux cas, ce sont des produits médicaux qui sont très règlementés et ne sont pas disponibles en vente libre en France. Seuls les professionnels de santé sont habilités à les prescrire et/ou les utiliser, ce qu’un tatoueur n’est pas. Votre tatoueur peut avoir de gros problème avec les autorités s’il pratique ce genre de chose ! Généralement, les artistes vous déconseilleront ce genre d’option, tant par principe ( « un tatouage, ça se mérite », « la douleur fait partie du processus ») que pour des raisons pratiques (les anesthésiants modifient la texture de la peau et peuvent rendre la procédure plus complexe pour lui, voire affecter le résultat).
Tu pourrais alors te dire qu’un doliprane, qui est vendu sans ordonnance, ça pourrait t’aider un peu de l’intérieur à défaut d’une anesthésie locale. Fausse bonne idée encore une fois. Pour avoir testé moi-même, la différence entre avec ou sans anti-douleur avant le tatouage est très minime. La grosse différence c’est lorsque les effets se dissipent !
Après quelques heures de tattoo, ton doliprane cessera d’agir et ton corps n’aura pas produit ses endorphines naturellement. Du coup le retour de bâton est terrible, et on finit par moins tenir le coup que si on avait rien pris. De plus, ces médicaments ont presque tous tendance à fluidifier le sang (particulièrement l’aspirine, à éviter à tout prix avant un tatouage) : le sang sort plus facilement de ta peau, donc ce sera plus compliqué de faire pénétrer de l’encre ! Et en plus tu cicatriseras moins efficacement au terme de ta session.
Voilà, t’as toutes les clés en main pour faire face à de grosses sessions de tatouage ou juste à un petit motif pour ton premier. Évidemment cette liste n’est pas exhaustive et tu inventeras surement tes propres techniques au fil du temps. Tant que tu es en confiance dans le studio et auprès de ton tatoueur, il n’y a aucune raison que ça se passe mal. Et pis ça vaut tellement le coup de souffrir un peu pour porter une oeuvre d’art sur la peau à vie !